Titouan Palomino, alumni de l’ISIGE, lance son entreprise engagée : Quasimodo, pour lutter contre le gaspillage alimentaire.

Petit-fils d’agriculteur, Titouan Palomino, étudiant du MS EEDD parcours IGE sera diplômé en décembre 2024. Après une année de formation décisive pour son parcours au sein de l’ISIGE Mines Paris-PSL, il a décidé de lancer son entreprise avec deux de ses amis Julien Machuron et Samuel Bigeard : Quasimodo. Une entreprise engagée, à son image, avec de fortes valeurs sociales et environnementales dont l’objectif premier est de soutenir les agriculteurs bio en s’attaquant au fléau du gaspillage alimentaire.

Face aux exigences de plus en plus contraignantes des acteurs de l’agro-industrie qui obligent les agriculteurs à jeter un grand nombre de fruits et légumes qui ne correspondent pas aux normes dès le stade de production, Quasimodo a une double mission : réduire l’empreinte carbone associée à cette surproduction et augmenter les revenus des agriculteurs bio.

Bonjour Titouan, quel est ton parcours et quel est celui des co-fondateurs ?

Mon premier M2, je l’ai obtenu en double-diplôme entre GEM (Grenoble École de Management) et l’IRIS, école de géopolitique. Entre mes deux stages de césure et mes deux alternances, j’ai eu en tout 4 expériences en RSE dans des grandes entreprises, sur des missions de sensibilisation sociétale, de calcul de bilan carbone ou de projets de décarbonation. C’est à GEM que j’ai rencontré les deux autres fondateurs de Quasimodo : Julien y a validé un M2 en stratégie marketing, et Samuel en business international.

 

 

Julien Machuron, Titouan Palomino et Samuel Bigeard
Julien Machuron, Titouan Palomino et Samuel Bigeard

En 2023, j’ai décidé de m’engager dans un nouveau cursus scolaire pour me spécialiser sur les sujets RSE. J’avais envie d’approfondir mes connaissances scientifiques sur les questions environnementales, de rentrer dans la technique, la pratique, et de prendre confiance en mes décisions. J’ai donc rejoint le MS EEDD parcours IGE (Ingénierie et Gestion de l’Environnement) des Mines de Paris, et d’un point de vue académique, cela a été la meilleure décision prise au cours de mon parcours de formation.

Quelles ont été les étapes clés jusqu’au lancement de votre entreprise ?

Tout s’est joué en 2020, il y a plus de 4 ans maintenant. Avec Julien et Guillaume, un de nos amis d’école, on a concouru au Hult Prize*, un challenge d’entreprenariat social très réputé. Le thème de l’année était “Food for Good” : il fallait créer une entreprise vertueuse dans le secteur agroalimentaire.

Étape 1 : trouver l’idée

Je suis petit-fils d’agriculteurs et enfant je passais mes week-end et mes vacances chez mes grands-parents dans le Gers. L’idée de s’attaquer au problème du gaspillage alimentaire est donc venue naturellement. Mais nous ne voulions pas devenir des acteurs du système actuel, même en faisant de l’anti-gaspi, car cela équivaudrait d’une certaine manière à faire vivre un modèle non soutenable. Nous voulions être hors système, créer notre propre logique de distribution à la fois proche des besoins des agriculteurs et respectueuse de l’environnement.

Étape 2 : trouver notre place

Nous nous sommes donc penchés sur la question, nous avons lu des rapports, discuté avec des professionnels, et nous avons compris que les exigences irraisonnées des acteurs de l’agro-industrie obligent les agriculteurs à jeter un grand nombre de fruits et légumes dès le stade de production. Trop petits, trop grands, trop biscornus. Et c’est parfois encore pire dans le bio, car les pratiques naturelles ne permettent pas forcément d’anticiper les récoltes, ce qui peut entraîner des sur-stocks.

Étape 3 : construire le projet

Après ce constat, on a tout imaginé très rapidement : la création de partenariats équitables avec les agriculteurs bio, la logistique en circuit-court, en respectant notre volonté de décarboner au maximum notre activité, l’essentiel de Quasimodo était déjà là.

Étape 4 : présenter Quasimodo

Avec cette idée, nous avons passé les quarts de finale du Hult Prize, et nous avons fini seconds aux demi-finales de Brême en Allemagne, ce qui nous a empêché de participer aux finales à New-York. Tant pis pour nous, tant mieux pour nos empreintes carbone.

Étape 5 : faire vivre Quasimodo

Le temps est passé mais l’idée est restée dans nos esprits, tant et si bien qu’en 2024 nous avons décidé de la concrétiser et de nous lancer.

*Le prix Hult met les jeunes au défi de résoudre les problèmes les plus urgents du monde par le biais de l’entrepreneuriat social. Chaque année, une équipe reçoit un financement de 1 million de dollars pour concrétiser son idée.

Quasimodo, concrètement qu’est-ce c’est ? Pourquoi avoir choisi ce secteur en particulier ?

Le concept de Quasimodo est de  recevoir des paniers de fruits et légumes toutes les semaines. Nos produits sont bio, locaux, nous avons également un système de sacs consignés pour éviter les déchets. Les produits que nous vous vendons, sont ceux que nos partenaires agriculteurs n’arrivent pas à écouler dans le modèle agroalimentaire actuel, ce sont les fruits et légumes trop petits, trop gros, bossus. On a vraiment à cœur de s’écarter de ces normes, pour un monde agricole plus durable. Nous livrons les paniers à vélo sur Paris.

Quasimodo, c’est une entreprise qui vend des paniers consignés de fruits et légumes bio qui viennent tous d’Ile de France, un circuit court, simple et solidaire. Notre volonté première, c’est d’être au service des agricultrices et agriculteurs qui en ont le plus besoin, celles et ceux qui n’arrivent pas à valoriser toutes leurs productions dans un contexte aujourd’hui tendu.

Les clients de Quasimodo sont abonnés à un service de livraison spécialement fait pour eux : le dernier kilomètre se fait à vélo, et les points relais sont choisis pour être proches de chez eux.

Si cette idée me plaît à ce point, c’est d’abord parce qu’elle me rapproche de mes premières valeurs sociales et environnementales. Mais c’est aussi parce que nos résultats sont palpables, et c’est cet aspect fondamental qui me manquait lorsque je travaillais pour de grandes entreprises.

«Nos agriculteurs partenaires sont très reconnaissants de cette initiative, c’est très gratifiant pour nous de se sentir utile.»

Dans quelle mesure La formation MS EEDD PARCOURS IGE t’a aidé à monter ce projet ?

La formation IGE m’a beaucoup aidé pour monter ce projet. Déjà, elle m’a donné confiance dans mes décisions qui touchent à l’environnement. Quand je dois faire un choix, je sais quantifier les différents scénarios, je sais maintenant  justifier mes actions. Et puis j’ai nettement plus d’idées, j’ai eu la chance de pouvoir échanger avec des dizaines et des dizaines d’acteurs du monde privé et public. J’ai encore beaucoup de choses à apprendre, mais j’ai beaucoup plus de clefs en main pour décrypter les différents enjeux environnementaux.

A ne pas sous-estimer, j’ai aussi eu une promo incroyable. Je m’y suis fait des amis brillants et hyper bienveillants. Encore aujourd’hui, à leur échelle, mes camarades de Promo nous aident à mener le projet Quasimodo. Ils font d’ailleurs partie de nos premiers clients. Enfin, j’ai aussi la chance d’être soutenu par l’ISIGE Mines Paris.

Pourquoi lancer une telle entreprise ? Quel est l’enjeu ?

Le gaspillage alimentaire continue d’être un problème majeur, autant d’un point de vue environnemental que social. Chaque année en France, 3 200 000 tonnes de fruits et légumes sont gaspillés au stade de production (Ademe, 2021). Autant de revenus en moins pour les agriculteurs, et autant de pollution émise en plus à cause de la surproduction associée. Samuel, Julien et moi, on est est vraiment animés pour œuvrer à l’inversion de  cette tendance.

Personnellement, j’avais aussi envie de m’écarter du schéma classique d’une carrière au sein de grandes entreprises. Quand on est engagé pour l’environnement, on peut souvent se sentir en décalage avec les grands groupes. En créant mon entreprise et en fixant mes règles, je me sens beaucoup plus en phase avec mes valeurs.

C’est d’ailleurs un sujet que j’ai envie de mettre au premier plan avec Quasimodo, en étant le plus transparent possible sur nos pratiques. Si on peut influencer le monde entrepreneurial à notre échelle, on ne s’en privera pas.

Quand est prévu le lancement de votre activité ?

Nos premiers paniers seront livrés le 13 novembre. On a hâte. On a de la chance, beaucoup de personnes nous ont suivis, nous allons  pouvoir faire un lancement à large échelle. Pour l’instant, on a un site internet optimisé pour smartphone. Julien a beaucoup travaillé dessus. On apprend, on bricole, cette entreprise c’est aussi l’occasion pour nous de faire de nouvelles choses, de partir de zéro sur certains sujets.

Comment peut-on,  à notre  tour, vous soutenir et vous encourager dans cette entreprise  ?

Vous pouvez vous abonner directement sur notre site, dans l’espace “Commander”. On compte sur vous, sur le bouche à oreille, il y a encore beaucoup de fruits et légumes bio à sauver en Île de France. Les premières semaines, vous pourrez vous régaler avec notre large palette de produits de saison : pommes, citrouille, butternut, pommes de terre, poireaux, radis long et encore d’autres variétés.
D’ici là, je vous félicite par avance pour votre choix de consommation engagé, et vous souhaite un excellent appétit avec nos délicieux fruits et légumes et… monstrueux !